Léonard Bernstein et le syntétiseur, 1969.

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plogbidman
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Re: Léonard Bernstein et le syntétiseur, 1969.

Message par plogbidman »

Cher Oryjen, il n'y avait pas d'offense dans mes propos, juste la volonté de débattre sur un sujet que je connais bien, les séquenceurs, et sur un autre sujet que j'adore, Bach.
Alors bien sûr, qu'on n'aime pas que la musique de Bach soit mise en séquences se conçoit fort bien. Et il faut dire que ça se passe souvent mal. D'ailleurs la démo présentée par Bernstein est assez pitoyable, je l'avais souligné dès le départ.
Mais puisque nous sommes sur un forum traitant de musique électronique, il faut aussi s'intéresser à la raison pour laquelle les musiciens électroniciens se sont particulièrement sentis attirés par la musique de Bach : son côté "mathématique". Pour beaucoup, l'aspect souvent très calculé des compositions de Bach se marie avec le côté strict de la musique séquencée ou assistée par ordinateur.
Évidemment, Bach joué par un ou des bons musiciens sera toujours mieux que joué par un séquenceur. Mais puisque nous sommes ici entre musiciens électroniciens, il nous est difficile de ne pas nous intéresser à ce que la musique électronique a fait de la musique de Bach (et d'autres musiciens classiques), et notamment à l'aide de séquenceurs. Et dans ce domaine, tout n'est pas à vouer aux enfers, enfin telle est mon humble opinion.
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oryjen
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Re: Léonard Bernstein et le syntétiseur, 1969.

Message par oryjen »

Mais puisque nous sommes sur un forum traitant de musique électronique, il faut aussi s'intéresser à la raison pour laquelle les musiciens électroniciens se sont particulièrement sentis attirés par la musique de Bach : son côté "mathématique". Pour beaucoup, l'aspect souvent très calculé des compositions de Bach se marie avec le côté strict de la musique séquencée ou assistée par ordinateur.
Mais cher ami à mon avis c'est justement là que le bât blesse: C'est une erreur tellement immense de croire que Bach mieux que tout autre se prête à l'exécution capitale par métronome électronique interposé!
Oui c'est le fond du sujet: Bach a lui-même parlé de mathématiques, comme moteur de sa méthode de composition, à une époque où l'on voyait dans les mathématiques, dont la complexité commençait à s'orienter vers les prémisses d'une abstraction très nouvelle (et plus seulement naturaliste) préfigurant l'aspect moderne et très "étrange" (que l'on peut ressentir comme une sorte de métaphysique, ou de méta-matique :wink: ) des mathématiques exotiques qui survinrent un siècle plus tard, l'expression la plus parfaite que l'on pouvait imaginer de l'intervention divine dans l'ordonnancement du monde...
Mais à l'écoute il est tellement évident que cette perfection mathématique n'est parlante que par le biais de l'imperfection humaine, qui s'efforce malgré tout de s'approcher...
Plus on s'approche de l'effacement total, plus le message est élevé, plus l'évidence est haute...
Retirer ce "presque rien" qui s'obstine à résister à l'effort de l'élagueur revient à retirer tout l'essentiel: La beauté, le fond du contenu, c'est le filtre lui-même (pas le VCF, heing... :fou: ). C'est son effort pour s'effacer qui dit le fond de ce qui est.
Pour beaucoup, l'aspect souvent très calculé des compositions de Bach se marie avec le côté strict de la musique séquencée ou assistée par ordinateur.
Appelons un chat un chat: C'est parce qu'ils sont stupides qu'ils font cette supposition.
Dans ce qui en résulte, cela s'entend.
Pour la raison même qu'il se réclame de certains principes mathématiques dans sa méthode, Bach n'est justement pas le plus facile à réduire aux mathématiques; et il est peut-être bien le plus difficile!
Après, que la stupidité soit en elle-même un spectacle fascinant se discute peut-être.
Pour moi, cet étalage de bête présomption, dans les résultats invariants qu'il propose, m'ennuie.
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pfeuh
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Re: Léonard Bernstein et le syntétiseur, 1969.

Message par pfeuh »

Pour moi le séquenceur, c'est comme la modération, on peut en user... Mais avec modération. Une basse séquencée, ça peut être vraiment sympa, un arpège qui arrive de nulle part et repart aussitôt aussi, mais faire jouer tout un morceau, surtout de cette richesse, par une machine (surtout de cette époque), à part l'exercice de style, je ne vois pas l'intérêt.

Mais les goûts et les couleurs, hein, je ne me pose plus de questions. Quand on voit des gens qui s'extasient devant un tweak de 20 minutes sur un filtre et qui vomissent Walter Carlos... D'ailleurs je me demande si cette démo n'est pas faite pour se moquer de ce qu'il faisait à l'époque. En ce sens, elle est tout à fait malhonnête, car ce qu'il faisait n'a rien à voir avec cette démo navrante.
Les gros m'aiment bien car je suis gros, les cons m'aiment bien car je suis con, mais les gros cons ne m'aiment pas car ce sont des gros cons.
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plogbidman
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Re: Léonard Bernstein et le syntétiseur, 1969.

Message par plogbidman »

Selon moi, et ça a toujours été mon discours, il faut distinguer 1) la musique, n'importe quelle musique, jouée à la main, sur le clavier d'un synthé, avec éventuellement l'appui d'un séquenceur et 2) la musique que j'appelle volontiers purement électronique uniquement créée sur des séquenceurs.
La différence est en effet de taille. En 1) on a toutes les nuances du jeu claviéristique du musicien, ce qui renvoie assez facilement à une éducation musicale de type classique et démontre son brio sur un clavier, alors qu'en 2) seul compte l'habileté à s'emparer des séquenceurs pour créer une musique dépassant les capacités du jeu humain pour aller éventuellement vers des domaines plus ou moins complexes et/ou abstraits.
Le jeu humain est celui du sentiment, de l'expression. Il est sans âge et universel. L'utilisation des séquenceurs est strictement moderne. Elle peut rebuter par son côté impersonnel et infaillible. Ou au contraire fasciner pour ces mêmes raisons. A chacun ses goûts...
Personnellement, j'apprécie énormément le côté hypnotique, voire irréel, des séquences, qui associé à l'écho lui donne un aspect cosmique. Mais ça suppose des séquences inventives et évolutives, pas juste des séquences faites à la va-vite et qu'on laisse paresseusement tourner sans compter.
C'est dans cadre qu'il ne me paraît pas déplacé de s'inspirer de Bach, ou d'autres compositeurs classiques, pour partir vers musiques uniquement séquencées purement électroniques si c'est fait avec goût et sensibilité. Après, c'est plus le talent qui interviendra sur le résultat final que la technique employée. Parce que même au travers d'un séquenceur, c'est l'humain qui s'exprime.
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EF98
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Re: Léonard Bernstein et le syntétiseur, 1969.

Message par EF98 »

Bach au séquenceur ou à l'ordinateur, ce ne sont que des attractions de foire.
Le séquenceur c'est un pis-aller pour les musiciens asociaux qui n'ont pas de copain pour jouer avec eux. :badgrin:

PS
Ory ici c'est prémices me semble-t-il. :vieux:
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plogbidman
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Re: Léonard Bernstein et le syntétiseur, 1969.

Message par plogbidman »

T'as raison EF98, le séquenceur, c'est très surfait... :palm:

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Franz
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Re: Léonard Bernstein et le syntétiseur, 1969.

Message par Franz »

On dirait que tout d’un coup c’est très calme :lol:
De mon Mos-Lab ne sortent pas des sons seulement dûs au hasard mais aussi à des faux mouvements.
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Franz
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Re: Léonard Bernstein et le syntétiseur, 1969.

Message par Franz »

... et je crois aussi que je me faire engueuler pour avoir créé un doublon :lol:

(mille excuses :roll: )
De mon Mos-Lab ne sortent pas des sons seulement dûs au hasard mais aussi à des faux mouvements.
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oryjen
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Re: Léonard Bernstein et le syntétiseur, 1969.

Message par oryjen »

Plogbid: Je n'ai pas de problème avec une musique créée au séquenceur et exécutée ad hoc. (personnellement la démarche ne m'enchante guère, mais ça ne me pose pas de problème disons "de fond"). Il en est même de très "parlantes" quand le programmeur se trouve doté d'un talent de compositeur (ce qui n'est pas automatique... ça c'est comme le matos de pointe à la pêche: https://www.youtube.com/watch?v=FeVYz2otvi8)
Par contre exécuter à la machine une partition écrite pour bipède vertical, c'est une idée débile, on ENTEND que c'est débile, et signe supplémentaire de la débilité de la démarche, c'est presque toujours Bach qui s'y colle, signe (pour moi) infaillible que les gens qui se livrent à ce genre de "trouvaille" sont juste des abrutis: Ils n'ont évidemment rien compris à Bach, n'y sont probablement même pas sensibles, et ne considèrent sa musique que comme une sorte de prétexte à se faire mousser.
C'est triste.
Pas tellement pour Bach, surtout pour eux, et pour les possesseurs des oreilles qui de temps à autre servent de déversoir à toute cette merde.

(Merci pour ce rappel de Philippe Druillet (mon héros!), par l'intermédiaire, six jeunes m'abusent, de l'une des pages de garde ou pages intercalaires de son sublime Salammbô! :sante: )
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oryjen
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Re: Léonard Bernstein et le syntétiseur, 1969.

Message par oryjen »

Gros Chat: Ayé j'y suis: le titre!
Le H (j'ai tapé comme un sourd "to be sure") de mon clavier déconne, et comme je suis une grosse tanche doublée d'un vieux croûton, je tape vite mais en regardant mes doigts, pas l'écran :palm:
Et quand chuis excité, pressé ou énervé, j'envoie souvent avant d'avoir relu. Relou.
:mdr:
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plogbidman
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Re: Léonard Bernstein et le syntétiseur, 1969.

Message par plogbidman »

Cher Oryjen, que tu ne sois pas d'accord pour qu'on séquence du Bach, et même pour que ça paraisse débile, est une chose. Mais les frontières sont faites pour être franchies, c'est ainsi. C'est ce qu'on nomme l'expérimentation. Tu n'empêcheras jamais quelqu'un de se dire "Et si..." Du genre "Et si je jouais du Bach sur un modulaire Moog..." Ou "Et si je programmais du Bach, du Vivaldi ou du Beethoven sur un séquenceur..." On peut en penser ce qu'on veut, et même en être révolté, on ne l'empêchera pas. Après, s'il y a expérimentation, il y a un résultat. Il peut indéniablement être bon, passable ou mauvais. Ça dépend en vérité surtout du talent de l'expérimentateur. Il n'est pas donné à tout le monde d'être Picasso et de déformer avec art les visages. Là c'est idem, on outrepasse Bach. Mais ce qu'il y a au-delà de Bach peut être très intéressant, voire même très beau. Tout dépend du talent de l'outrepasseur. Il faut des outrepasseurs. Si nous sommes sur ce forum, c'est qu'il y a eu des outrepasseurs pour se dire un jour "Je ferai de la musique avec de l'électronique..." alors que la plupart des gens trouvaient ça débile...
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Franz
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Re: Léonard Bernstein et le syntétiseur, 1969.

Message par Franz »

Intéressant cet échange :sante:

@orygen
Merci pour l’extrait du concours de pêche :bravo:
De mon Mos-Lab ne sortent pas des sons seulement dûs au hasard mais aussi à des faux mouvements.
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oryjen
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Re: Léonard Bernstein et le syntétiseur, 1969.

Message par oryjen »

Il y a deux manières de traverser une barrière: Par-dessus ou par-dessous.

Et pour finir je répète que je n'entends empêcher personne de faire, dire, prétendre ou publier ce qu'il veut.
Mais chaque fois qu'on montrera un "bidule" en exemple de je ne sais quelle "créativité", qui n'a parfois aucun autre mérite que celui d'exister si l'on veut, je revendique le droit de pouvoir venir dégonfler la baudruche.
C'est bien d'essayer des trucs, même par moment à tort et à travers dans une espèce de fièvre un peu désordonnée où on se permet de tirer tous les bouts de pelote qui se présentent, sans trier.
Bon mais à un moment on en vient à se demander "ce que ça donne", tout de même. Surtout si l'on part d'un objet culturel déjà fort repéré.
Quand Dali prend la Joconde et y colle une paire de moustaches, il y a un jeu, il y a de l'amusement, de la fantaisie jusqu'à un certain point gratuite, mais comme c'est la Joconde, tout de suite ça prend un sens.
Si l'on n'est pas complètement niais ou complètement inculte, et si l'on souhaite éviter ce genre de situation forcément connotée par le contexte lui-même où la chose est appelée à être perçue, qui (ce contexte) est un bien commun, on prend pas la Joconde; on prend autre chose.

Bon il y a une troisième manière: Parfois on prend qqch pour une barrière juste parce qu'on a décidé d'avance que ça devait être abattu , franchi, voire (soyons fous) dépassée (il y a des gens qui ne fonctionnent que "contre"; ce qui est aussi une manière d'obéir à un conditionnement qqpart...)
Or il s'agit peut-être d'autre chose en vérité: Un marchepied? Une échelle? Un escalier? Un coup de pied au derche? :wink:
Alors là on s'approche, on s'approche et... "tiens, c'est pas une barrière! Bon, je passe!"
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plogbidman
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Re: Léonard Bernstein et le syntétiseur, 1969.

Message par plogbidman »

Expérimenter ne signifie pas être contre. Ça signifie plutôt être ailleurs, être un rêveur. Les rêves des uns ne sont pas ceux des autres. L'un voudra jouer Bach dans sa dimension humaine, l'autre voudra le jouer à l'aide d'un synthé plus ou moins modulaire, d'un séquenceur plus ou moins digital , voire même d'un ordinateur top niveau. L'opération peut partir en peau de nouille. Ou réussir à merveille si le gars est bon dans son truc. Et d'autres recommenceront après en rêveurs doués ou pas. Mais, rassure-toi, il aura toujours de bons musicos pour jouer Bach avec tout l'art qu'il mérite sur un orgue, sur un piano ou sur un violon. Mais là, on ne parle plus de musique électronique...
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oryjen
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Re: Léonard Bernstein et le syntétiseur, 1969.

Message par oryjen »

En fait y'a une sorte de némésis un peu inutile (ou franchement, tiens...) à vouloir "s'emparer" des classiques pour en faire "autre chose".
Au fond c'est toujours l'idée du sacré, on a encore les deux pieds profond collés dans ce plat-là, qu'il s'agirait de "mettre à bas", ou plus gentiment d'"actualiser" ou je ne sais quoi (et pourquoi diable foutre?).
Mais c'est très bête ça, à deux titres:
D'abord c'est peut-être par là même contribuer à renforcer le statut de référence qu'ont certains objets-jalons, alors que justement le sens du "geste" serait d'en finir avec...
Ensuite, c'est dommage pour le potentiel-même du média qu'on utilise pour ce faire. Je veux dire si l'on veut exprimer si haut le potentiel de modernité, de renouvellement, d'invention formelle voire expressive qu'on prête à telle ou telle technique, moyen d'expression, forme communicante, etc... pourquoi diable aller s'enferrer dans une forme ancienne, conçue selon des critères, une dynamique (déjà elle-même révolutionnaire à l'époque) et des contraintes éteints?
Quel sens peut bien avoir de "faire du Bach" avec des moyens différents que ceux qui avaient présidé à l'élaboration première?
Bach sans les moyens de Bach ça ne tient pas debout. Et notre petit père Bach aujourd'hui, le même qu'alors avec la même niaque, ne ferait certainement pas le "Bach" qu'il fit en d'autres temps: c'était un absolutiste révolutionnaire, ce type. Un dingue!
C'est comme mes élèves en peinture qui s'obstinent à "faire du Monet, du Renoir, du Pissaro" en 2021, en évitant soigneusement, même en peignant d'après photos (de paysages), d'y mettre les voitures, les routes, et les fils électriques.
C'est absurde; Ca n'a aucun sens, sinon celui de se complaire dans une illusion de maîtrise à propos de qqch que l'on n'a visiblement pas compris: Il y a des fils électriques chez les impressionnistes; des bâtiments modernes à structures métalliques révolutionnaires; des véhicules high tech (des locos et bateaux à vapeur): on le leur a bien assez reproché à l'époque. Et s'ils étaient là aujourd'hui, évidemment, ils nous étonneraient, voire nous scandaliseraient (enfin toutes ces mamies qui se piquent de grandeur Hârtistique en tout cas... :cool: )

Bref, faire du Bach au séquenceur quand on a un système modulaire, à part la performance un peu bé-bête (qui de toute façon tombe à plat... en terme de performance justement), c'est dommage pour Bach (mais c'est bien là le moindre mal en fait: Vue l'altitude du bonhomme, la bave du crapaud etc...), c'est dommage pour la musique (parce que le résultat est naze), et c'est dommage pour le programmeur qui aurait sûrement bien mieux à faire de son fourbi!
Si le SENS de certaines oeuvres anciennes continue aujourd'hui à briller bien vif au sein d'une forme transfigurée par (disons) "l'inspiration", la forme elle-même, reprise comme telle, est une coquille vide, déconnectée de tout un réseau de causes et d'effets transitoires qui ont aussi contribué à la façonner.
"Enfonce ton clou, pas celui des autres" disait le bon Van Gogh.
Il eût pu ajouter "car TU es le seul à pouvoir enfoncer ce clou-là".
Cette petite maxime résout d'un coup, et l'air de rien, l'ensemble des "problèmes" liés au "sujet", au "contenu", à la "forme", au "style", enfin à la justesse poétique.
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Re: Léonard Bernstein et le syntétiseur, 1969.

Message par plogbidman »

Il y a une sorte de proverbe qui dit "un thème musical est comme une flèche. Un premier musicien la lancera le plus loin possible. Ensuite un autre musicien ramassera la flèche et la lancera encore plus loin." C'est pour ça qu'on empêchera jamais un musicien utiliser une composition de Bach, de Verdi ou de Brahms pour en faire autre chose. Par exemple Gainsbourg, qui a beaucoup puisé chez Chopin. Fallait-il lui interdire de bâtir ses chansons à partir de morceaux classiques ? Lui en a fait sa marque de fabrique et est devenu Gainsbourg comme ça. Pensons aussi à Walter Carlos, qui a bâti sa célébrité en puisant dans Bach. Et ce ne sont là que deux exemples parmi d'autres !
Mais pourquoi s'arrêter à Bach et à ses semblables ? Il y a aussi ceux qui pillent Jean-Michel Jarre, Kraftwerk, Klaus Schulze ou Tangerine Dream, hein, puisque nous sommes sur un site de musique électronique. Lancent-ils la flèche plus loin ? C'est à voir...
Après il y a les inventifs, les dénicheurs, les géo-trouve-tout de la musique électronique. Et c'est tant mieux. Encore qu'il faut bien avouer que tous ne lancent pas leur flèche terriblement loin. Mais c'est là où, cher Oryjen, je te rejoins. Être original, c'est le top. Mais je te soumets cette simple question : peut-on être original seul, sans jamais se référer à un autre musicien ?
De qui a-t-on ramassé la flèche avant de se prétendre original en la lançant plus loin ?
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oryjen
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Re: Léonard Bernstein et le syntétiseur, 1969.

Message par oryjen »

Il peut y avoir qqch comme des "archers de contrebande", placés en touche... :cool:

Bon c'était une chouette discussion dont je te remercie chaudement!
Pour une fois qu'on peut causer du fond des choses sans que personne ne s'en trouve offusqué!
:bravo: :sante:
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plogbidman
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Re: Léonard Bernstein et le syntétiseur, 1969.

Message par plogbidman »

Merci à toi aussi, j'ai adoré débattre à bâton rompu avec toi.
Dans ma boite, on dit échanger. J'aime beaucoup l'idée d'échange.
:bravo: :sante:
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jeanfé
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Re: Léonard Bernstein et le syntétiseur, 1969.

Message par jeanfé »

Leonard Bernstein était bien plus enthousiaste que vous à propos de la musique séquencée ! Il n'y a aucune ironie dans la vidéo, et il a travaillé avec Wendy Carlos par la suite.

Je suis toujours un peu interloqué par ce lieu commun sur la musique de Bach qui serait "mathématique" ; il n'est pas le seul à avoir composé des fugues et des canons.. on ne dit jamais du final de la symphonie Jupiter qu'il est mathématique, par exemple.

Avec un mono, ce n'était pas possible en 1969 de proposer autre chose que de la musique contrapuntique. Et Walter Sear n'a pas simplement rentré des notes en midi ; il les a programmé sur des 960 (qui devaient apparaître comme une technologie extraterrestre aux autres musiciens de l'époque). Il me semble que l'enjeu ici était de montrer qu'on pouvait jouer des choses harmoniquement plus ambitieuses que Popcorn avec un Moog.

Incidemment il n'y a jamais d'indication de jeu dans une partition de Bach. Alors comment dire que les propositions de Carlos/Sear sont irrecevables ? Glenn Gould n'a jamais reproché à Carlos de manquer de "touché détaché", et jugeait que Switched on Bach était l'un des "plus grands exploits de l'histoire pianistique (!)".
https://www.openculture.com/2019/08/gle ... -bach.html
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oryjen
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Re: Léonard Bernstein et le syntétiseur, 1969.

Message par oryjen »

W.Carlos jouait à la main, non?
Et exploit pianistique certes (selon Glenn Gould), que de jouer ces partitions sur ces claviers plastoque à ressorts!

A propos de Bach et des mathématiques, Bach vivait au siècle de Newton, Pascal, qui ont insufflé aux mathématiques un essor sans précédent et montré par leur intermédiaire que l'on pouvait acquérir une compréhension du monde plus détaillée, plus vaste, débouchant sur un trouble métaphysique renforcé (Newton sur l'optique (la lumière...) et l'astrophysique, Pascal sur les mathématiques fondamentales, les sciences naturelles, en lien avec le monde tel que nous le percevons: il en tirera une philosophie et une métaphysique nouvelles et proprement vertigineuses), suite à quoi Voltaire (son contemporain) forgera le concept de Dieu comme "grand horloger" de l'univers.
J'ai déjà expliqué plus haut sa posture par rapport à l'ordonnancement mathématique de la musique; bien qu'il n'ait pas laissé de notes d'interprétation sur ses partitions, il s'était exprimé à ce sujet quant à la composition.
Faut-il lui donner l'unique crédit de cette posture? Peu importe, et sans doute pas: C'était le "siècle des Lumières". Il est bien naturel que la ferveur ait trouvé dans cette vision plus fouillée et plus étendue des mécanismes de la nature matière à renouveler sa stupeur et son émerveillement.
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