
Ory sera toujours Ory !

Un sabre au tranchant inoxydable !
Bon, Xplorer, comme tu l'auras compris, Ory ne considère pas les paraphoniques avec une franche admiration du point de vue technologique...

Ou plutôt que ceux-ci ne sont pas exactement de VRAIS synthés, selon le "noble" principe classique du VCO/VCF/VCA.
D'où le fait que la plupart des VRAIS polyphoniques ont un nombre restreint de touches jouables simultanément, alors que les paraphoniques de conception un peu bâtarde du point de vue synthèse sonore peuvent faire jouer toutes les notes du clavier simultanément sans limitations.
Bon je ne vais pas paraphraser ce qu'Ory a d'ailleurs très clairement expliqué plus haut, mais je sais parfaitement ce qui t'a ébloui dans le son du Performer.

D'ailleurs, à une époque fort reculée, c'est ce qui avait motivé mon achat de son cousin, le Crumar Trilogy !
Le Trilogy est justement un paraphonique comprenant une section "Strings" à 2 voix, une section "Organ" assez cheesy à 4 voix, et une section "Polysynth" à deux voix, toutes sections mixables et simultanées.
La particularité des paraphoniques, Ory l'a déjà dit, est qu'ils disposent d'oscillateurs très simples, produisant une onde carrée, sur le principe du tout-ou-rien extrêmement classique en électronique depuis les premiers temps des circuits logiques CMOS et TTL d'il y a des décennies. Un oscillo par note, accordé sur la plus aiguë, ou même un ou deux octaves plus haut pour améliorer la précision et la justesse de chacune des 12 notes de la gamme chromatique.
Or ces signaux carrés sont accompagnés d'une quantité importante d'harmoniques, de par leur forme intrinsèque. Disons pour simplifier énormément que lorsqu'un signal électrique possède une forme géométrique avec des transitions franches et brutales, il se produit lors de chaque transition une sorte "d'écho électrique" à des fréquences multiples de la fréquence fondamentale, et que l'on appelle harmoniques. En gros, hein ? Et même en très très gros...
Bon, ensuite, il se trouve qu'avec un filtrage de ces signaux carrés avec leurs harmoniques, selon un jeu de simples filtres passe-haut et passe-bas bien calculé, on obtient un assez joli son de string-machine, très typique des Crumar de l'époque. On peut même avoir un léger réglage de la brillance de ce filtre pour affiner un peu la sonorité des strings. Oh, joie intense ! Et même si l'on fait jouer simultanément les octaves supérieures et inférieures en les mixant, on peut même épaissir ce son de strings. Et si on double le nombre initial d'oscillateurs, c'est à dire 12 + 12 légèrement détunés, on peut même obtenir de magnifiques effets d'ensemble ressemblant un peu à un effet de chorus, pour à peine plus cher en composants. C'est la recette miracle de Crumar pour produire ses célèbres strings
italiens, que l'on retrouve sur la plupart de ses machines de l'époque !
Bon, l'autre partie, celle dite "synthé poly" est plus complexe, quand même. En revanche, les signaux carrés qui sont utilisés d'un côté pour les strings, sont ici traités par des circuits analogiques de type "différentiateurs capacitifs" qui transforment électriquement les créneaux du carré en triangles, comme ce qui est en principe obtenu sur un authentique VCO. Bon, les triangles ne sont pas tout-à -fait identiques à ceux d'un VCO digne de ce nom, mais ils ne sonnent pas comme les carrés d'origine et c'est ça qui importe !
Ensuite, l'astuce consiste à construire un jeu de 6 cartes VCF + VCA dans lesquels on fera passer ces signaux groupés par octave, et même par couple de notes (exemple : DO et FA#, DO# et SOL, etc...) pour permettre aux filtres VCF de rester peu saturés en signaux, et surtout de permettre un préréglage mieux accordé à la ou aux notes qu'ils doivent traiter. Ensuite, il reste à faire un décodage astucieux du clavier pour déclencher les VCAs associés (même chose, tous les DO et FA# ensemble sur un VCA, tous les DO# et SOL, sur le VCA suivant, etc...). Du coup, les enveloppes déclenchent presque tout à fait comme sur un mono, et on ne remarque pratiquement pas le fait que certaines notes rejouent lorsqu'on en joue une autre plusieurs octaves plus haut ou plus bas. C'est le cas du DO et du FA# tenus sur une partie du clavier, et qui seront répétées à chaque nouveau DO ou FA# joué n'importe où ailleurs sur le clavier. Et même chose, couple par couple, pour chaque groupe de note associé par VCF et VCA.
Sur la vidéo que tu donnes, on entend en permanence ces fameux strings sous forme de "tapis" avec un très long release, et la partie "synthé poly" vient juste se rajouter dessus, avec une sonorité très fortement filtrée par un passe-bas très fermé qui rend le son très doux, d'autant que l'enveloppe est molle et lente avec des transitions très progressives qui accentuent la douceur du son du synthé. Ça donne une épaisseur et un charme supplémentaire au son, ces deux layers bien différenciés et très complémentaires, avec l'acidité des strings, et la rondeur du poly. C'est exactement ça qui en fait son charme !

Et je crois même qu'il y a un léger detune des strings qui donnent un peu de chorus